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RDC : Peut-on faire opposition à la condamnation de Matata Ponyo ?

La condamnation par défaut de l’ancien Premier ministre Augustin Matata Ponyo, prononcée par la Cour constitutionnelle de la République démocratique du Congo, continue de faire couler beaucoup d’encre. Peut-il contester ce jugement en formant opposition ? La question divise les juristes et relance le débat sur les voies de recours en matière pénale devant la plus haute juridiction du pays.

Condamnation par défaut : une procédure exceptionnelle

Selon Me Séverin Walisinga, avocat au barreau du Maniema, « une condamnation par défaut intervient lorsqu’un prévenu ne comparaît pas personnellement devant la juridiction appelée à le juger. » En droit congolais, ce type de condamnation n’est pas sans conséquence : « Elle ouvre généralement droit à l’opposition, c’est-à-dire la possibilité pour le condamné de solliciter un nouveau jugement, cette fois en sa présence », explique-t-il.

Dans le cas d’espèce, Matata Ponyo n’a pas comparu devant la Cour constitutionnelle. Celle-ci a néanmoins statué sur son sort, le déclarant coupable dans une affaire liée à la gestion des fonds du parc agro-industriel de Bukanga-Lonzo.

L’opposition est-elle possible devant la Cour constitutionnelle ?

« Le Code de procédure pénale, en son article 104, prévoit clairement que toute personne condamnée par défaut peut faire opposition devant la juridiction ayant rendu la décision », rappelle Me Walisinga. En principe, l’opposition est recevable lorsque le jugement a été prononcé en l’absence du prévenu, et elle suspend l’exécution de la peine jusqu’à la tenue d’un nouveau procès.

Mais la situation se complique : la Cour constitutionnelle n’est pas une juridiction ordinaire. Elle constitue, en droit congolais, la plus haute instance judiciaire. « La véritable question est de savoir si cette Cour admet l’opposition comme voie de recours. En l’absence de disposition spécifique dans la loi organique qui la régit, cette possibilité demeure juridiquement floue », nuance Me Walisinga.

Une immunité en question

L’avocat souligne également un autre point sensible : l’immunité parlementaire de Matata Ponyo. « En tant qu’ancien Premier ministre et sénateur, il bénéficiait d’une immunité. Toute procédure judiciaire à son encontre aurait donc dû être précédée d’une levée formelle de cette immunité par l’Assemblée nationale », précise-t-il.

Or, cette formalité n’aurait pas été respectée, selon lui. Ce manquement pourrait constituer un vice de procédure majeur et justifier un nouveau procès devant la même juridiction.

Entre vide juridique et nécessité de clarification

En résumé, si la possibilité d’une opposition semble fondée sur les principes généraux du droit pénal congolais, son application devant la Cour constitutionnelle demeure incertaine. « Ce cas met en lumière une lacune du droit congolais qu’il serait urgent de combler, soit par une réforme de la loi organique de la Cour constitutionnelle, soit par une jurisprudence qui précise les contours des voies de recours dans ce type de situation », conclut Me Séverin Walisinga.

Alors que les avocats de Matata Ponyo envisagent de contester le jugement, l’évolution de cette affaire pourrait faire date dans l’histoire judiciaire de la RDC, en définissant les droits effectifs des prévenus jugés par défaut devant la Cour constitutionnelle.

D.M.
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