Dans une tribune adressée au Tremplin, le député national Flory Mapamboli Posa alerte sur un déséquilibre persistant au cœur du système fiscal congolais : la contribution nettement plus élevée des salariés du secteur privé à l’Impôt professionnel sur les rémunérations (IPR), comparée à celle des agents publics. Un écart qui, selon lui, fragilise la confiance envers l’État, nourrit un sentiment d’injustice sociale et limite la capacité budgétaire du pays.
Un impôt au cœur du contrat social congolais
L’impôt, rappelle l’auteur, constitue l’un des piliers essentiels du contrat social. Il assure le financement de l’action publique, soutient le développement national et incarne la solidarité entre citoyens. S’il devrait, en principe, s’appliquer à tous avec équité, la pratique démontre une tout autre réalité en RDC.
L’IPR, régi par le Code général des impôts, représente près de 20 % des recettes collectées par la DGI et plus de 11 % de l’ensemble des recettes domestiques. Mais cette importance stratégique contraste avec une mise en œuvre inégale selon les secteurs d’emploi.
Deux poids, deux mesures entre privé et public
Dans le secteur privé, l’application de l’impôt sur les rémunérations est stricte : retenue à la source, contrôle régulier de la DGI, taux progressifs pouvant atteindre 30 %. Cette discipline contribue fortement aux finances de l’État.
À l’inverse, le secteur public fonctionne encore avec des mécanismes incomplets. Les taux uniques de 3 % et 15 % sont appliqués de manière partielle. Certaines primes et indemnités échappent encore aux états de paie normalisés. Pour Flory Mapamboli Posa, cette situation relève davantage de contraintes structurelles, outils de gestion obsolètes, absence de standardisation, transition administrative, que d’un choix politique.
Des chiffres 2024 qui parlent d’eux-mêmes
L’auteur cite les données officielles suivantes : 2 935 milliards CDF d’IPR collectés en 2024, dont 89,5 % provenant du secteur privé ; seulement 10,5 % issus du secteur public ; un taux d’imposition effectif d’environ 3,4 % sur la masse salariale de l’État, et même en dessous de 3 % lorsqu’on inclut les rémunérations non permanentes ; un taux de réalisation de 50 % des recettes publiques prévues en IPR, contre 123 % dans le privé.
Les impôts sur les revenus des membres des institutions politiques, prévus à 413 milliards CDF pour 2024, n’ont été recouvrés qu’à 120 milliards, soit 29 %.
Pour le député, ce diagnostic n’est pas polémique : il reflète surtout une absence de normalisation et un potentiel de mobilisation fiscale encore largement inexploité.
Un projet de loi de finances 2026 qui accentue la pression sur le privé
L’analyse se poursuit avec les prévisions du budget 2026, qui anticipent une hausse de 30 % des recettes IPR. Mais cette augmentation reposerait quasi exclusivement sur les salariés du secteur privé : + 872 milliards CDF attendus du privé ; contre + 64 milliards CDF seulement du public.
Flory Mapamboli Posa s’interroge sur les hypothèses retenues pour ces projections, estimant que le gouvernement n’a pas encore engagé la réforme structurelle nécessaire pour formaliser l’économie, renforcer la production nationale ou moderniser les outils de gestion de la rémunération publique, pourtant essentiels pour améliorer la mobilisation fiscale.
Un impératif de justice fiscale
L’enjeu, selon le député, n’est pas d’opposer les travailleurs des deux secteurs, mais de souligner que la viabilité budgétaire de l’État passe par une fiscalité cohérente, équitable et appliquée de manière uniforme. L’iniquité actuelle alimente la défiance, affaiblit la cohésion nationale et compromet les efforts de développement.
À travers cette tribune, Flory Mapamboli Posa appelle enfin à une modernisation urgente des mécanismes de paie, à une meilleure transparence et à une harmonisation des pratiques afin de restaurer la confiance des citoyens dans l’impôt et renforcer la crédibilité de la politique budgétaire.
Le Tremplin