Par Charles Masudi/Le Tremplin
Le 14 octobre 2025 aurait pu marquer une césure historique dans la quête de paix à l’Est de la RDC. Un mécanisme de surveillance et de vérification du cessez-le-feu venait d’être signé à Doha entre le gouvernement congolais et l’AFC/M23, sous l’égide du Qatar et avec le soutien de puissants partenaires internationaux. L’espoir renaissait. Le peuple congolais, longtemps meurtri par un conflit interminable, entrevoyait enfin une lueur de répit.
Mais voilà qu’à peine les encres sèches, la guerre des accusations reprend. Par la voix de son porte-parole, l’AFC/M23 affirme que les forces armées congolaises auraient procédé à des bombardements dans les heures suivant la signature de l’accord. Si cela est vrai, c’est un véritable camouflet diplomatique. Si cela est faux, c’est une manipulation dangereuse et cynique.
Alors, de quoi s’agit-il ? D'une diversion stratégique ? D’une dénonciation fondée ? Ou d’une manœuvre de positionnement dans les coulisses de la médiation ?
Le problème, c’est que quelle que soit la réponse, c’est toujours la population qui paie le prix fort. Celle qui, dans les collines du Nord-Kivu et les vallées du Sud-Kivu, vit la peur au ventre, les valises prêtes pour un nouveau déplacement, une nouvelle perte. On ne signe pas la paix pour la trahir le jour même. On ne crie pas à la libération tout en semant la terreur dans les villages.
Si les accusations de l’AFC/M23 sont infondées, elles relèvent d’un cynisme inacceptable, car on ne joue pas avec la douleur des civils pour servir une propagande. Dans ce cas, comment continuer à revendiquer le rôle d’un mouvement de libération alors qu’on instrumentalise la guerre dans le moment même où on prétend vouloir la paix ?
Mais si les faits dénoncés sont avérés, le gouvernement congolais doit s’expliquer sans détour. Il ne s’agit pas seulement d’un faux pas militaire, mais d’une trahison des engagements pris devant la communauté internationale, et surtout devant son propre peuple. Ce serait une gifle à tous ceux, partenaires, diplomates, victimes, qui ont investi temps, énergie et confiance dans le processus de Doha.
Le doute est là. Il faut des vérifications indépendantes. Ce mécanisme signé à Doha le permet : que les observateurs fassent leur travail, en toute transparence.
Mais au fond, une vérité demeure : soit on veut la paix, soit on veut la guerre. Il n’y a pas de demi-mesure. Et ce théâtre diplomatique sur fond de bombes, de déclarations contradictoires et de double langage commence sérieusement à lasser une population qui n’a que trop souffert.
Il est temps que les deux camps, Kinshasa comme l’AFC/M23, fassent preuve de maturité politique et de sincérité. La voie des armes ne leur a jamais été facile. Et elle ne le sera jamais. En revanche, la diplomatie, si elle est respectée, peut ouvrir un chemin de stabilité.
Ce coup de théâtre, survenu à peine quelques heures après la signature d’un accord plein d’espoir, est de très mauvais augure. On ne peut pas continuer à gaspiller les millions de dollars des contribuables congolais dans des dialogues sans lendemain, sans en payer le prix politique, moral, et humain.
Messieurs les dirigeants, déposez vos égos. Élevez votre vision. Mettez le peuple au centre. Il en va de votre légitimité, de votre humanité, et de l’avenir du pays.